Quand on l’aperçoit de l’extérieur, il est semblable à n’importe quel appareil de ligne. Seulement, à la place des 300 sièges passagers qu’il devrait contenir, ce Boeing en comprend à peine 40. Pourquoi ? Parce que tout le centre de l’appareil est voué à un autre usage. C’est une zone de free floating, protégée du sol au plafond. Free what ? Free floating. Car dans cet appareil-là, on expérimente l’apesanteur. « Je veux y aller, je veux y aller », vous écriez-vous. Minute, papillon. Ce n’est pas aussi simple. D’abord, parce qu’il faut y mettre le prix. Presque 6000 euros pour un vol de ce type en Europe. Oui, ça calme les ardeurs. Heureusement, il existe une autre solution, pour laquelle j’ai personnellement opté. Le même vol aux Etats-Unis, pour une valeur de 4500 euros. L’occasion de s’offrir un voyage avant et après cette activité unique. Mais je blablate, et vous voulez sans doute en savoir plus sur le vol. Alors c’est parti. Attachez vos ceintures, on s’envole à 25000 pieds. Car c’est là haut que ça se passe. Sitôt après le départ, j’ai pu détacher ma ceinture et quitter mon siège pour rejoindre la zone matelassée. Il a fallu attendre ensuite 25 interminables minutes pour que débute la première parabole. Mais l’attente en valait la peine. Bon, pour ceux qui connaissent pas le principe du vol parabolique, je résume brièvement (en même temps, résumer longuement, ce serait un peu stupide). Chaque parabole se segmente en plusieurs tranches. Quand on entame la parabole, on ressent d’abord l’hypergravité : on pèse presque deux fois son poids pendant une vingtaine de secondes. Puis c’est le contraire et l’on se retrouve en microgravité. La première phase se révèle plutôt perturbante. Allongé au sol, j’ai l’impression d’être en plomb. Je sens mes yeux s’enfoncer dans leurs orbites. Heureusement, l’appareil touche le faîte de la parabole et file tout droit en chute libre : la seconde phase commence ! Avec la première parabole, je peux tester la gravité de la planète rouge, soit 0,38g. Chaque mouvement se voit accentué. C’est fun, tous les participants (une quarantaine) font de grands sauts, ça parle toutes les langues dans la cabine. Le pilote annonce la fin de la parabole et je me plaque sur le plancher. Nouvelle phase où je pèse presque deux fois mon poids. Quelques secondes après, je retrouve mon poids normal et je reprends mon souffle. Wow ! C’est le seul mot qui me vient en tête. Il y a à peine une minute et demie entre chaque parabole, et c’est reparti pour l’obésité temporaire. Cette fois, je découvre la gravité lunaire : 0,16 fois la nôtre ! Durant vingt secondes, tout va au ralenti dans l’appareil. J’ai l’impression d’être dans une des centaines de films de science-fiction que j’ai pu voir au cours de ma vie. A la suivante parabole, plus de gravité du tout. Idem pour les douze qui suivront. Je passe brusquement de 120kg à 0 kg! La sensation est troublante. J’avais pas mal potassé sur la microgravité, mais rien ne m’avait préparé à ça. Le corps n’est pas préparé à un tel choc : perdre un repère aussi naturel et invariable que la gravité ! Délicat de manoeuvrer lorsque on n’est pas entraîné. Mais deux paraboles plus tard, me voilà fin prêt : je flotte dans l’air sans rien frôler. Difficile d’imaginer pareille sensation. Ce qu’on éprouve lorsqu’on s’affranchit de quelque chose d’aussi ancien évident que la gravité. Des milliards d’humains ayant vécu avant moi, seule une poignée d’entre eux aura connu cette sensation de liberté, et j’en fais partie ! Grisant et inoubliable. Suivez le lien pour en savoir plus sur ce vol en apesanteur.